« Le poète » de Michael Connelly

L’affaire est claire pour tout le monde ; Sean McEvoy, de la police de Denver, s’est suicidé d’une balle dans la tête. Pour tout le monde, sauf pour Jack, son frère jumeau… Un mot retrouvé près du cadavre le met sur la piste d’autres suicides qui n’en étaient peut-être pas. Leur point commun : des lettres d’adieu reprenant des poèmes d’Edgar Allan Poe. ces meurtres vont se révéler l’oeuvre du tueur le plus redoutable de tous les temps…

Michael Connelly, je ne le connaissais que grâce à la série TV « Castle » dans laquelle il apparait régulièrement et joue son propre rôle lors des scènes de parties de poker avec Richard (Castle), Stephen J. Cannell (scénariste et producteur d’un nombre incalculable de série américaines), Dennis Lehane (« Shutter Island », « Mystic River »…) et  James Patterson (auteur que je ne connais pas encore).

De g. à d. : Richard Castle (interprété par Nathan Fillion), James Patterson, je crois, Michael Connelly et Stephen J. Cannell

Puis j’ai vu un de ses livres dans la pàl à Memy sur Facebook (pas LE pal, hein, c’est pas une descendante de Vlad l’Empaleur, Memy) (enfin, pas à ma connaissance, dumoins) (Memy, si tu me lis… hu hu !)

Bref, on a commencé à papoter, et elle m’a conseillé de commencer la lecture de Connelly par son chef d’oeuvre, « Le Poète », qui, ô hasard, s’est retrouvé sur ma liste d’anniversaire, puis dans mes paquets.

D’emblée, ça a bien commencé. L’écriture est sobre, presque sèche, claque comme un coup de feu. L’auteur ne se perd pas en descriptions inutiles (genre Harlan Coben qui décrit les fringues de ses personnages féminins tous fagotés comme l’as de pique), il n’y a pas un mot de trop. Et ceux-ci sont méticuleusement choisis, rendant la lecture rapide, fluide, aisée.

La construction du livre est également pertinente. On alterne entre deux points de vue, deux narrations, concernant les deux personnages principaux :

– une narration à la première personne, celle de Jack McEvoy, jumeau du flic assassiné, journaliste de son état, qui va mener l’enquête ;

– une narration à la 3ème personne concernant Gladden, une saloperie de pédophile que l’on suit dans ses errances.

Au début, on se demande un peu le lien entre ce dernier et le tueur de flic, puis petit à petit, au gré de l’enquête menée par le journaliste puis par le département des sciences du comportement du FBI (comme dans « Esprits Criminels ») tout s’éclaire (encore heureux, tu vas me dire !)

La galerie de personnages est parfaite. Il n’y en a pas trop, ils sont tous parfaitement crédibles, avec leurs forces, leurs faiblesses, leurs failles, sans être non plus des caricatures complètement torturées (à l’instar des personnages de « Une place à prendre » de JK Rowling, par exemple…)

Quant à l’intrigue, elle est bien menée, sans temps mort, passionnante, mais sans être trépidante non plus. Ce n’est pas un livre qui m’a empêché de m’endormir parce que je voulais savoir la suite. Toutefois, on veut savoir, bien entendu !!!

La fin est bien emmenée, avec plein de rebondissement.

Mais moi, je dirais trop. Et surtout, SURTOUT, à la fin-fin, il n’y a pas de réponse sur le pourquoi. Pourquoi cette personne est-elle devenue céréales serial killer, hein ? Ben on ne le sait pas. Alors certes, on arguera que dans la vie, on n’a pas toujours les réponses à nos questions, on se sait pas toujours le pourquoi du comment. Sauf que là, en l’occurence, ça fait un peu bâclé, échappatoire. Hop, l’assassin c’est cette personne, merci bonsoir.

Dommage, car ce livre est vraiment excellent, sinon. On sent bien le passé de journaliste de Connelly qui a reçu le prix Pulitzer pour ses reportages sur les émeutes de Los Angeles en 1992. Tout est documenté, crédible, précis, comme notamment toute la technologie informatique de 1996, qui parait tellement obsolète aujourd’hui ! Par exemple, quand un des personnages envoie un mail, il nous décrit le processus, le bruit du modem analogique… Trop rigolo !

Ce livre est donc un excellent roman policier, mais je ne dirais pas un chef d’oeuvre non plus, sans doute à cause de cette fin qui ne m’a pas plu. Il n’en reste pas moins qu’il m’a permis de découvrir un auteur dont j’apprécie particulièrement l’écriture, et que je relirai sans aucun doute, puisqu’en plus, une gentille blogpote qui se reconnaîtra m’a offert « Echo Park ».

Affaire à suivre, donc !

« Le poète »

Michael Connelly

Points / Editions du Seuil, 1996

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« Quelque chose dans la nuit » de Mikaël Ollivier [polar springsteenien]

« Trois accords en boucle, un riff de guitare, un refrain… 
Something In The Night. Ils sont des dizaines de milliers à avoir entendu cette chanson. Six d’entre eux en mourront. Quatre hommes et deux femmes dont le seul lien est leur passion déraisonnable pour une star, Bruce Springsteen, le Boss. Six fans traqués par la mort de concert en concert, de Madrid à Hambourg, à Londres, Paris et Anvers. 
Suicides ? Accidents ? Une loi des séries à laquelle Damien, gendarme passionné de musique, ne peut croire. Il entraîne malgré lui son frère, le commissaire Guillaume Le Guen, dans une enquête aux quatre coins de l’Europe qui ne cesse de les ramener au plus profond d’eux-mêmes. C’est leur monde qui menace de s’écrouler, vingt années de passion partagée. C’est leur vie qui est en jeu. Car comme il est dit dans la chanson de Springsteen qui donne son titre au roman : « Rien n’est oublié ni pardonné. » »

S’il y a un livre qui avait tout pour me plaire, c’est bien celui-là ! Un polar dans l’univers du Boss Bruce Springsteen ! C’est mon gentil beau-frère Topol qui me l’a fait emmener par le Père Noël. Cependant, comme je lis en fonction des saisons (ben oui, que veux-tu…) et que l’hiver m’est plus réservé à l’Heroïc Fantasy et aux grands classique (mais instinctivement, hein, c’est pas réfléchi !), je n’ai véritablement eu envie de m’y plonger que cet été.

C’est donc fébrilement que j’entamai la lecture de ce roman écrit par un des plus grands fans de Springsteen, Mikaël Ollivier, qui a d’ailleurs écrit sa biographie dite de référence : « Bruce Frederick Springsteen » chez Le Castor Astral et préfacée par Antoine de Caunes (tu vois un peu, quoi…).

A l’issue des deux premiers chapitres, je refermai le livre, dans un état un peu bizarre… Ce n’est que le lendemain, lorsque je le repris pour en continuer la lecture, que je pus mettre un nom sur ce sentiment ; l’énervement.

Oui, la lecture m’avait énervée, et je ne savais pas trop pourquoi, d’ailleurs. J’ai donc continué plus avant, et commencé à faire connaissance avec les divers protagonistes de l’histoire, tous des fans fous-furieux du Boss, le suivant lors de ses tournées européennes, connaissant tout de lui, ayant un nombre incalculable de pirates, des photos dédicacées, des souvenirs en pagaille…

« Ne serais-je pas un peu jalouse ? » me suis-je demandée en mon for intérieur. « Est-ce pour cela que ce bouquin m’énerve ? »

J’ai encore continué, et je me suis fait une raison : ce livre m’ennuyait, et surtout, je n’aimais pas du tout les personnages. Tous des cons, selon mon jugement personnel ! Et puis la description de leur petite vie de merde, pour la plupart, censée probablement nous conduire sur l’explication des meurtres pas beaux qui touchent un à un les membres de la bande de fans, me gonflait profondément !

Mais franchement, les fans de Springsteen ne peuvent être que des gens bien !!!

(mais c’est évident, voyons ! Les cons ne peuvent pas aimer ce mec si génial, si humain, si intègre !)

Et là, on a quoi ? Des cocufieurs et cocufiés en pagaille, des histoires de coucheries, des toxicos, des folles, des dealers, des chieurs, des tristes, des médiocres… C’en est caricatural, et ça m’a saoulée comme il faut. A aucun instant je ne suis parvenue à m’attacher (et encore moins à m’identifier) à un seul des héros, qui pourtant, sont fans de Springsteen comme moi ! Non, en fait, plus que moi ! Même que c’en est maladif, pour eux ! Et en tant que bonne control freak qui se respecte, je n’aime pas les pertes de contrôle quelles qu’elles soient. Ces fans, que je pensais jalouser au début, je les trouvais en fait pathétiques, et ça m’a rendue triste.

Cela étant, j’ai tout de même continué le livre, car il est extrèmement bien écrit, et puis je voulais savoir qui était le meurtrier. Mais alors que les trois premiers quarts du livre m’ont paru longs ! Seul le dernier quart, où tout se dénoue (et où j’avais déjà deviné l’identité du meurtrier depuis un bon moment grâce aux indices semés çà et là dans le bouquin) s’accélère un peu et a trouvé grâce à mes yeux.

Par ailleurs, deux autres choses m’ont également énervée dans ce polar.

La première, c’est quand l’auteur fait intervenir Bruce, et s’autorise à le faire penser, réagir. J’ai trouvé, dans toute ma retenue objective habituelle (mon cul), que c’était un sacrilège ! Qu’il n’avait pas le droit ! D’ailleurs, en général, je déteste les fictions faisant intervenir des personnages pas encore morts. Je m’imagine célèbre et en vie, et je pense que je n’apprécierais pas du tout que l’on me fasse subir un tel « traitement ».

La seconde, c’est la deuxième enquête menée par le grand-frère du gendarme, le policier de Montpellier. Elle n’a strictement aucun intérêt, et n’apporte pas grand’chose à l’histoire proprement dite. Si c’était juste pour brouiller les pistes, c’était pas franchement la peine…

Donc tu l’auras compris, j’ai été extrèmement déçue par ce livre. Sans doute m’en faisais-je trop une fête… Cela dit, les autres critiques que j’ai pu lire sur le net sont assez positives, pour ne pas dire élogieuses ! Je pense que ma déception tient plus à ma personnalité tordue qu’au livre en lui-même.

Le mieux, c’est donc que tu t’en fasse une idée par toi-même, et surtout si tu aimes le Boss !

Je concluerai cet article en te laissant écouter la chanson qui a donné son titre au roman (« Something in the Night » sur l’album « Darkness on the Edge of Town »), et dont une phrase est le leitmotiv de l’assassin : « Nothing is forgotten or forgiven »…

Et là, c’est que du tout bon…

m

« Quelque chose dans la nuit » de Mikaël Ollivier

Editions Le Passage (2011)

“Proies” de Mo Hayder

« Alors qu’elle dépose ses courses dans le coffre de sa voiture, une femme est jetée au sol par un individu qui prend la fuite à bord du véhicule. Selon la police, pour qui il ne s’agit que d’un banal fait divers, l’agresseur ne s’est sans doute pas rendu compte de la présence d’une fillette sur la banquette arrière. Mais le scénario s’assombrit : l’enfant reste introuvable et une deuxième petite fille disparaît dans les mêmes circonstances. Le ravisseur ne tarde pas à se mettre en contact avec la police… A nouveau, le commissaire Jack Caffery et le sergent Flea Marley vont plonger dans l’horreur à l’état pur. »

Cela faisait longtemps que je n’avais pas eu un tel coup de coeur pour un écrivain. Dès les premières lignes du roman, j’ai été séduite.

Pourtant, je ne l’ai pas acheté exprès. Ce titre est celui que j’ai choisi en gratuit pour l’achat de deux autres livres chez Pocket (« Le sang du temps » de Maxime Chattam et « Fractures » de Franck Thilliez). Il faut dire que j’en avais lu des critiques élogieuses dans ELLE, et que quand les beaux jours arrivent, j’aime à délaisser mes sagas d’Heroic Fantasy pour des polars (oui, je lis comme je fume et comme je mange et m’habille : selon les saisons) (certains –Isaaaaaaa !!!!!!!- trouvent ça bizarroïde, mais que veux-tu, la Crapaude est ainsi faite !)

Ainsi, j’ai récemment lu “Sans un adieu” et « Ne le dis à personne… » de Harlan Coben, auteur de polar encensé par la critique et le public s’il en est, qui m’a laissée de marbre. J’ai trouvé ses intrigues bien menées, certes, mais ses personnages non crédibles, et son écriture fade, froide… Quant aux choix vestimentaires décidés pour ses protagonistes, ils sont, comme dans tous les polars américains que j’ai lus (Patricia Cornwell ou Mary Higgins Clark par exemple), complètement atroces !!! Pour la fashionista même “de campagne” que je suis, c’est carrément intenable (souvent genre twin set bleu ciel avec jupe plissée beige… yerk !!!) Et ça suffit pour me gâcher une partie de l’éventuel plaisir (je te jure).

J’ai donc tenté Mo Hayder, car femme et anglaise, donc forcément de bon goût pour la mode vestimentaire (oui, bon, quoi, je ne suis pas objective, je sais…), et Thilliez et Chattam, car français avec des intrigues assez alambiquées a priori.

Le premier sur la pile trônant dans ma bibliothèque tellement remplie qu’elle en dégueule des livres était le Mo Hayder, alors pouf, c’est celui que j’ai embarqué pour nos mini-vacances dans le Sud lors du week-end de l’Ascension. Et vu le temps pourri qu’on a eu, surtout le samedi, on est resté sagement à l’appartement à glandouiller après avoir visité l’aquarium du Cap d’Agde (petit, mais sympa, surtout quand y’a rien d’autre à faire… Pis Crapouillette Ière a enfin pu assouvir sa passion pour les oursins) (oui, je sais, la fille est aussi étrange que la mère…)

Afin de me distraire tandis que Crapouillette faisait des dessins et que Monlolo regardait un truc de sport à la TV tout en lisant Libé, j’ai commencé la lecture de “Proies”.

Eh ben dis donc, j’ai eu du mal à le lâcher !!! Cela faisait vraiment très longtemps que je n’avais pas autant apprécié de lire en journée (la dernière fois, c’est lors des vacances de Noël 2002, mes premières vacances de Noël d’instit’, quand, alors qu’il neigeait à gros flocons et qu’un feu crépitait dans la cheminée, je m’étais farci les quatre premiers tomes de la saga Harry Potter afin de comprendre l’engouement de mes élèves pour le petit sorcier (et j’en suis devenue plus accro qu’eux !!!)).

D’ailleurs, j’ai tout de suite pensé que ce “Proies” aurait pu avoir été écrit par JK Rowling si elle faisait des polars. Le style est limpide, clair, concis, générateur d’images mentales immédiates alors que les descriptions, des lieux comme des personnages, sont courtes (donc pas chiantes et ne ralentissant pas le rythme de l’histoire).

Quant au rythme, donc, il est trépidant ! Pas un temps mort quel que soit le personnage, la piste, l’intrigue (car il y en a plusieurs qui se croisent puis se rejoignent) qu’on suive. On tremble, on frissonne, on a la nausée quand on lit et imagine le destin des petites filles enlevées par le ravisseur…

C’est qu’en quelques mots, Mo Hayder a le don de faire naitre des sensations, des sentiments, notamment pour les personnages parfaitement dépeints, tout comme leur vie quotidienne absolument banale qui se rapproche de la mienne (boulot, gosses, campagne…) et qui bascule dans l’horreur. Personnages et situations sont parfaitement crédibles, ce qui augmente l’identification du lecteur et amplifie le ressenti.

Ce roman-là est un page turner dans toute sa splendeur, mais un vrai bon, un EXCELLENT, et ce à tous niveaux : intrigue, style… Je l’ai donc terminé en deux coups de cuillère à pot, et me suis commandé “L’homme du soir” et “Rituel” de la même auteure suite aux recommandations d’une tweetpote (voir ici pour le côté un peu ubuesque de la conversation…)

Du coup, tu auras sans aucun doute très bientôt deux nouvelles critiques littéraires ici-même !

“Proies” de Mo Hayder, Pocket (2010)

A lire (et le précédant) dans la même série :

« L’homme du soir » (2002), « Rituel » (2008) et « Skin » (2009)